Poker, jeu de hasard ou de stratégie ?
Décidément, le statut du poker, entre jeu de stratégie et jeu de hasard, n’en finit pas de faire jaser.
Il y a quelques jours, les équipes de police du Service Central des Courses et de Jeux ont ainsi fait fermer le Cercle Wilson, un cercle de poker installé en plein cœur de Toulouse.
L’argument avancé pour cette fermeture, c’est tout bonnement que le poker est un jeu de hasard et qu’il ne peut par conséquent pas être joué avec de l’argent ailleurs que dans des casinos ou cercles de jeux disposant d’un agrément. Reste à savoir si la justice abondera dans ce sens…
Voilà maintenant de longs mois que la nature du poker fait débat en France. En effet, s’agit-il d’un jeu de stratégie ou d’un jeu de hasard ?
Pas évident de le dire, les différents juges ayant dû se prononcer à ce sujet ayant réussi à créer un flou juridique par des décisions n’allant jamais dans le même sens…
En effet, le 20 Juin 2011, le Tribunal Correctionnel de Toulouse avait mis en lumière le fait que le poker était un jeu de stratégie et rien d’autre.
Amenés à se prononcer à ce sujet dans une affaire relative à la fermeture d’une maison de jeux agissant sans autorisation, les juges avaient suivi l’avocat de la défense, Maître Cohen, qui prônait la relaxe de ses clients, l’organisation de jeux de type stratégie n’ayant aucun caractère illégal en France.
En appel de cette même affaire en Janvier 2013, les juges de la Cour d’Appel suivront une nouvelle fois la ligne de la défense qui parviendra à prouver que le poker n’est en rien un jeu de hasard puisque si le hasard existe en partie assurément pour un joueur novice, cela n’est plus le cas dès lors que la partie voit s’affronter des joueurs habituels.
Comme lors d’une affaire similaire jugée à Clermont Ferrand, les juges considèreront donc que « le poker est marginalement un jeu de hasard » mais que c’est avant tout les compétences des joueurs qui permet de remporter ou non une partie.
Même les Tribunaux s’y perdent à propos du poker : hasard ou stratégie ?
Pourtant, une décision de la chambre criminelle de la Cour de Cassation de Versailles allait changer la donne en fin d’année 2013 en prenant le contre-pied des précédentes décisions.
Invités à se prononcer sur la tenue d’une maison de jeux sans autorisation, les juges avaient cette fois estimé que le poker était un jeu de hasard et que par conséquent des parties payantes ne pouvaient pas être organisées hors des casinos et des cercles de jeux.
Les propriétaires de la maison de jeux avaient ainsi hérités d’une amende de 20 000€.
Le Club Wilson dont le Président est Hervé Pietraru compte bien se défendre
Reste maintenant à savoir à quelle sauce vont être mangés les « gérants » du Club Wilson de Toulouse.
Interrompus le 26 Février 2014 en pleine partie, les habitués du Club Wilson n’ont semble-t-il pas trop compris ce qui leur arrivait.
En effet, si les policiers du Service Central des Courses et des Jeux ont rapidement informé qu’ils avaient pris sur le fait des joueurs et qu’avaient été saisis plus de 200 kilogrammes de jetons indiquant des sommes de 1 à 100€ dans l’appartement de 200 m2 où s’était installé ce repaire des joueurs de poker de Toulouse en Juin 2013, rien ne prouve jusque-là une quelconque « illégalité » de ce cercle de jeux bien connus des habitants de la ville Rose.
Les équipes du Service Central des Courses et des Jeux ont profité de cette descente pour interpeler l’organisateur des parties de poker ainsi qu’un croupier qui « exerçait » au sein du Club.
Néanmoins, cette interpellation à de quoi surprendre puisque Hervé Pietraru, le Président du club Wilson, avait annoncé à l’ouverture du cercle de jeux que tout était en règle et que les autorités compétentes avaient pu découvrir d’elles-mêmes les locaux mais aussi le fonctionnement du Club Wilson.
Tout cela n’aura néanmoins pas empêché le Service Central des Courses et des Jeux à intervenir et à fermer le Club Wilson arguant que le poker avec argent est réservé aux casinos et cercles de jeux agrémentés en vertu de la décision rendue fin 2013 par la Cour de Cassation de Versailles.
Le Club Wilson ne devrait néanmoins pas se laisser faire et compte bien sur Maître Cohen, celui-là même qui avait remporté une bataille en 2011 afin de prouver que le poker n’était pas un jeu de hasard, pour le sortir de cette mauvaise passe.
Ne reste plus qu’à savoir si les juges toulousains considèreront que la décision de la Cour de Cassation fait jurisprudence ou si, comme le déclare l’avocat du club de Wilson, celle-ci n’est qu’un arrêt d’espèce.
Peut-être saura-t-on donc bientôt si le poker, en particulier le texas hold’em, est un jeu de hasard ou non… En fait, le poker et ses stratégies ainsi que ses hasards ne fait que s’apparenter à une polémique politicienne.
On se croirait en effet dans un débat politique où le jeu du poker menteur est Roi. L’enjeu ? Les taxes tout simplement !